Un Ennemi du peuple
Tomas Stockmann est médecin d’une petite ville dont l’avenir repose sur
l’activité de ses bains thermaux.
Qui dit thermes dit patients dit clients :
emplois et développement économique.
Bref, la théorie capitaliste du
ruissellement !
Le Docteur Stockmann (Xavier Fernandez Cavada), alerté par plusieurs cas de maladies, est vite convaincu que les bains sont contaminés. C’est naturellement qu’il prévient les autorités, certain qu’elles réagiront en conséquence. En particulier la Maire de la ville, Petra Stockmann (Rachel Gordy), qui n’est autre que sa propre sœur (dans le texte original, il s’agit de son frère). Et puis, Stockmann n’a-t-il pas les médias avec lui par l’entremise d’un journaliste, Hovstad (David Marchetto), qui s’apprête à rendre public les analyses de l’eau ? Et aussi les classes moyennes personnifiées par l’imprimeur Aslaksen (Pierre Spuhler), qui est aussi président de l’Union des petits propriétaires, et qui est prêt à faire bloc avec les habitant·e·s de la ville pour soutenir la vérité ? Seul à s’opposer à lui dès le début, son beau-père, principal pollueur de la ville avec son usine en amont, qui déverse ses déchets dans la rivière, finira par l’enfoncer financièrement (Pierre Banderet).
A voir ou lire la pièce, on ne se douterait pas qu’elle date de 1883. En passant par une nouvelle traduction originale, je n’ai pas visé particulièrement la modernité (même si des termes sont devenus plus contemporains, ainsi des petits-bourgeois devenu la classe moyenne). C’est surtout le travail dramaturgique et la direction d’acteur qui m’a permis de resserer les enjeux sur notre actualité : la femme du Docteur, Katrine Stockmann (Léonie Keller, enceinte de 7 mois au moment des représentations) amenaient une modernité et un questionnement accru sur ce que nous laissons à nos enfants, à l’avenir ; le personnage d’EIlif, le fils de 9 ans (Sven Devanthéry) terminant par ailleurs la pièce par une réplique ajoutée : « Mais Papa ? Et après ? »… Le choix méticuleux de la distribution et les enjeux thématiques, le besoin de défendre chaque personnage et sa vérité, de ne pas colorer ce monde-là d’un manichéisme forcément simpliste a permis de donner un formidable écho contemporain à l’oeuvre, qui a frappé nombre de spectateur·tice·s par sa modernité. J’ai beaucoup insisté sur cette remarque tirée de la correspondance d’Ibsen à propos de sa pièce : « C’est une comédie ou un drame : on y trouve beaucoup d’aspects de la comédie, mais aussi un fond sérieux. » En rappelant en permanence les comédien·ne·s à l’humour des personnages, le drame mis en jeu par la pièce (en ces temps de crise sanitaire, de pollutions, de théories complotistes, de défiance face à la science et d’urgence écologique) est totalement parvenu à notre public Bien mieux que si nous avions forcé le trait noir que porte en filigrane cet Ennemi du peuple. Les thèmes principaux ont rejoints de manière troublante nos préoccupations actuelles.


Ça va l’étonner, le vieux. Lui qui me croit fou. C‘est pas le seul à le croire. Mais maintenant, ces braves gens vont voir – ils vont voir ce qu’ils vont voir maintenant – ! Ça va foutre le bordel en ville, Katrine ! Tu n’as pas idée. Il va falloir refaire toutes les canalisations.

On y constate la présence de matières organiques en décomposition – cette eau est tout à fait nocive pour la santé, que ce soit pour un usage interne ou externe.

N’est-ce pas l’opinion générale que notre ville est un endroit salubre ?

Toutes sortes de rumeurs vont se répandre et des gens mal intentionnés parmi nous s’emploieront à les grossir par des détails en tout genre. Il est donc impératif que tu démentes publiquement ces rumeurs.

Tu as dit hier que les pires saloperies venaient de mon usine. Mais si c’était vrai, alors mon grand-père et mon père avant moi et moi-même, nous aurions, durant toutes ces années, souillé la ville, comme trois anges exterminateurs. Crois-tu que je laisserai cette honte peser sur moi ?

C‘est ici le champ de bataille. C‘est ici qu’aura lieu le combat. C’est ici que je triompherai ! Dès que mon pantalon sera recousu.
Interprètes
Mise en scène et traduction Eric Devanthéry Docteur Tomas Stockmann Xavier Fernandez Cavada La Maire Petra Stockmann, sa sœur Rachel Gordy Katrine Stockmann, sa femme Léonie Keller Aslaksen, imprimeur Pierre Spuhler Morten Kill, père adoptif de Katrine Pierre Banderet Hovstad, journaliste David Marchetto Eilif, fils de Katrine et Tomas Sven Devanthéry
Équipe
Assistante mise en scène Tamara Fischer Scénographie Julien Brun Assistants et consultants scénographie Gregory Wattebled & Hugo Jamain Régie général, effets spéciaux et fumées Laurent Boulanger Lumière Philippe Maeder Costume Valentine Savary Musique Cyril Cyril Mixage musique David Chesnel Technicien·nes Laurent Boulanger, Parpaing, Mathieu et Laura Desfarges Direction technique TO Fred Jarabot Photographies Magali Dougados Administration France Jaton
Tournée 2023

Léonie Keller & Sven Devanthéry
Katrine Stockmann & leur fils EIlif

Pierre Spuhler & David Marchetto
Aslaksen, l’imprimeur & Hovstadt, le journaliste
Au fond, Katrine Stockman et son fils Eilif
De dos Petra Stockmann, la Maire de la Ville